Je le remets, tant pis.
Mamie m'a dit que quand j'étais petite, je saluais l'eau. Je me penchais tout doucement, caressais la surface parfois, et je chuchotais "Bonjour, l'eau" ; alors nous pouvions nous promener près d'elle tranquillement. Quand venais le moment de rentrer, je lui disais au revoir.
Au revoir, l'eau.
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Je voulais te le dire.
C'était
toi. Toi qui me faisais sautiller sur le chemin de l'école, par la
simple pensée de ton sourire, alors que nous avions à peine quatre ans.
C'était toi qui hurlais mon prénom avant de sauter dans mes bras dès
que je passais la grille de l'école. C'était contre toi que j'étais
assise dans l'ombre du tilleul, et que nous riions à se chuchoter au
creux de l'oreille les secrets féeriques de notre enfance. C'était avec
toi que nous nous roulions dans l'herbe verte, jusqu'à percuter le
tronc des arbres,les mains liées, le souffle court. C'était ta voix
qui portait nos rêves, tes jambes qui courraient près des miennes, mes
doigts qui essuyaient tes larmes, nos songes qui dansaient ensemble la
nuit. Et je nous revois, aujourd'hui. Je revois la cabane des arbres,
et celle au fond de ton jardin, je revois la cour de récrée, la forêt
derrière chez Léo, les potions vertes et bleues, les petits mots que tu
écrivais, et tout ce qui reste autour de nous, sans bouger, le décor de
notre histoire.
C'est toi. Toi qui me fais avancer un peu plus, qui
nourrit mes souvenirs et ceux de notre avenir. C'est toi qui as versé
tant de larmes dans mon cou, et qui sait tout comme moi que ce
n'étaient pas les dernières. C'est toi, ton sourire, tes sourcils
froncés, ton regard étonné, ta façon de danser et de faire cuire les
crêpes. Toi qui étais. Toi qui es. Toi qui sera.
Je voulais te le dire et te l'entendre dire. Juste une fois, dis le moi ;
Jusqu'à la mort nous resterons celles que nous étions.
Le reste tu le sais.